L’incendie de Notre-Dame: l’heure est au bilan

Par Mathilde Lahon 16/04/2019 Incendie

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L’incendie qui s’est déclenché à Notre-Dame hier a eu raison de sa flèche et d’une partie de sa toiture. Actuellement terminé, il est temps de revenir sur ce qui a pu être sauvé, ce qui est endommagé et ce qui est perdu à jamais.

La cathédrale Notre-Dame de Paris, avant d’être un monument emblématique de la capitale, est un lieu sacré visité chaque année par des milliers de croyants. L’incendie qui s’est déclaré hier a pu endommager sévèrement ses trésors liturgiques, oeuvres d’art et objets précieux. En effet, étaient conservés dans l’enceinte de ce lieu sacré des joyaux artistiques et architecturaux, chéris par l’ensemble des visiteurs quotidiens.

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Ce qui a été sauvé

Les rosaces, datant du XIIème siècle ont tenu bon. Ces trois chefs-d’oeuvres présentent la Vierge, l’Enfant Jésus, le Christ mais également des prophètes, anges, saints et rois. Des zones noircies sont à noter mais ces dernières ne présentent pas de danger pour leur structure générale. Mgr Chauvet indique cependant que l’une d’entre elles devra peut-être être démontée. Il s’agira alors de vérifier que le plomb entre les carreaux vitrés n’aura pas fondu sous l’effet de la chaleur. Si c’est le cas, une déformation du vitrail sera alors à prévoir.

A l’image de ces rosaces sauvées, la structure, la façade et les tours sont également hors de danger. Cependant, une évaluation de la résistance du bâtiment est actuellement en cours. Cette opération a pour but de prévenir l’édifice de potentiels effondrements futurs. Mais « la structure de Notre-Dame est sauvée », comme l’a annoncé le ministre de la Culture, Franck Riester, aux micros de France Inter. Malgré l’effondrement de la croisée du transept et du transept nord, l’édifice semble à l’abri pour le moment.

Les statues de la flèche de Viollet-le-Duc avaient été décrochées quelques jours plus tôt. Par un heureux hasard, elles n’étaient donc pas sur la flèche au moment de l’incendie. Les 12 apôtres et 4 évangélistes monumentaux en cuivre séjourneront donc à Périgueux jusqu’en 2024.

Le Trésor indemne

Depuis des siècles, la cathédrale veille amoureusement sur son Trésor. Ni la Révolution Française, ni les émeutes de 1831 ou la Commune de 1871 n’auront réussi à le faire totalement disparaitre. Si ces grands événements auront provoqué un éparpillement partiel, le Trésor aura toujours été progressivement reconstitué. Il en est donc de même aujourd’hui. Tout au long de la nuit, les pompiers ont été guidés pour sauver les oeuvres les plus importantes. Laurent Nunez, Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur l’affirmait ce matin. « Les collaborateurs de Notre-Dame, les architectes des bâtiments de France, le personnel du ministère de la Culture se sont mobilisés pour orienter les sapeurs-pompiers pour leur désigner les oeuvres qu’il fallait à tout prix sauver » explique-t-il.

Les reliques, quant à elles, ont été miraculeusement sauvées. Tout d’abord, la Sainte Couronne, la plus précieuse pour les croyants. En effet, ces épines, à présent maintenues par des joncs reliés par des fils d’or, auraient été posées sur la tête du Christ lors de sa crucifixion. Elle est conservée dans un tube de cristal et d’or depuis 1896. Montrée aux visiteurs chaque premier vendredi du mois, elle n’a pas été endommagée par les flammes. Les deux autres reliques sont elles aussi en lieu sur. Le clou de la Passion du Christ ainsi que la tunique de Saint-Louis datant de 1239 ont été transférés en lieu sur, à la mairie de Paris.

Les 13 tableaux qui ornaient les chapelles de la nef, appelés « Grands Mays » sont eux aussi sains et saufs. La tradition voulait que chaque 1er mai, la corporation des orfèvres parisiens fassent cadeau à la cathédrale d’un tableau à la thématique religieuse. Ils se trouvent également à présent au sein de la mairie de Paris. Ainsi, toutes les oeuvres faisant partie du Trésor de la cathédrale ont été sauvées.

Ce qui a été endommagé

Le sort du grand orgue est pour le moment incertain. Il est trop tôt pour se prononcer sur l’état de l’instrument datant du XVème siècle pour ses plus vieilles pièces. Mais si une catastrophe a néanmoins été évitée, les tuyaux ont tout de même été endommagés. Après le passage du feu et de chaleur, il est possible que l’eau des lances des pompiers ait infiltré les quelque 8000 tuyaux du grand orgue. En effet, l’eau présente un danger réel pour les sommiers, pièces maîtresses de l’instrument. Il faudra également surveiller la couche de suie qui s’est déposée sur les 5 claviers.

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A propos des autres oeuvres d’art, il faudra attendre avant de pouvoir constater l’effet de la chaleur sur les matériaux. Des analyses plus poussées devraient avoir lieu rapidement sur le groupe sculpté de Coustou et Coysevox, de la Vierge Médiévale du pilier sud etc.

Le feu a aussi endommagé les vitraux. Une couche noire s’est déposée sur ces verres colorés. Il faudra néanmoins patienter avant de déterminer la gravité de ce dépôt. La bonne nouvelle étant qu’ils n’ont pas explosé sous l’effet de la chaleur.

Pour terminer, le maître-autel. Installé en 1856 lors des rénovations par Viollet-le-Duc, il semble avoir résisté aux flammes. Mais, son décor de plaques de cuivre clouées et dorures serait légèrement endommagé. Encore une fois, il faudra attendre des travaux de sécurisation pour que des équipes spécialisées puissent procéder à de plus importantes analyses. Quant à la croix derrière le maître-autel, cette dernière est encore debout.

Ce qui a été détruit

Dès le lendemain de la catastrophe, une agence russe, Gigarama, proposait une vue à 360° de la cathédrale, pour mieux constater les dégâts.

Notre-Dame après l'incendie vue de haut
Gigamara / Vue à 360° le lendemain de l’incendie

Intégralement tombée, la flèche de Viollet-le-Duc datait de 1859. Elle s’est écroulée peu avant 20h, deux heures après le début de l’incendie. Haute de 93 mètres, elle s’est entièrement effondrée sur le toit de la cathédrale.

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Mais bonne nouvelle, on pensait le coq de la flèche disparu. En son sein, il protégeait les reliques de la cathédrale. Il était en réalité tombé sur un chêneau, hors du foyer de l’incendie, au moment où la flèche a basculé. Déformé, cabossé par le choc et les flammes, il ne pourra pas être remonté sur la flèche. Il est actuellement exposé au ministère de la Culture.

Quant à la charpente, la « Forêt », elle a été entièrement mangée par les flammes. En chêne, elle n’était pas visible par le public. Il s’agissait de l’une des plus anciennes de Paris (avec celle de Saint Pierre de Montmartre), datant de 1220. Le porte-parole des pompiers a bel et bien assuré la destruction du joyeux architectural de 21 hectares. « L’ensemble de la toiture est sinistré, l’ensemble de la charpente est détruit, une partie de la voûte s’est effondrée » a-t-il expliqué.

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Sources

France Inter

Le Monde

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